Précisions sur les veilles précédentes :

Décret du 10 septembre 2022 relatif au droit de préemption pour la préservation des ressources en eau destinées à la consommation humaine.

L’article L. 218-1 du code de l’urbanisme dispose qu’ “à la demande de la commune, du groupement de commune ou du syndicat mixte compétent pour contribuer à la préservation de la ressource en eau (…) l’autorité administrative de l’état peut instituer un droit de préemption des surfaces agricoles sur un territoire délimité en tout ou partie dans l’aire d’alimentation de captage utilisés pour l’alimentation en eau destinée à la consommation humaine. Ce droit de préemption a pour objectif de préserver la qualité de la ressource en eau dans laquelle est effectuée le prélèvement”.

Le titulaire du droit de préemption est celui qui peut solliciter l’institution de ce droit : une commune, un groupement de communes, un syndicat mixte compétent. Ce droit peut être délégué à un établissement public local par délibération de l’organe délibérant de la personne publique titulaire du droit.

Lorsque le droit de préemption est exercé pour acquérir une fraction d’une unité foncière, le propriétaire peut exiger que le droit porte sur l’ensemble de l’unité foncière (art. L. 218-7 C; urb.). Le titulaire du droit peut accepter cette acquisition aux prix et conditions fixées ou y renoncer ; sa décision doit parvenir au notaire dans le délai de 30 jours à compter de la date de réception de la décision du vendeur, le silence vaut renonciation et rétractation.

Le droit de préemption urbain, le droit de préemption dans les ZAD, le droit de préemption dans les espaces naturels sensibles du département et du conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres priment sur le droit de préemption des ressources en eau destinées à la consommation humaine.

Le droit de préemption des ressources en eau destinées à la consommation humaine prime sur le droit de préemption de la SAFER sur les zones concernées.

La procédure de préemption des ressources en eau destinées à la consommation humaine est soumise aux règles applicables au droit de préemption urbain, le décret du 10 septembre 2022 procédant à ce renvoi.

Textes :

 

Décret n° 2022-1289 du 1er octobre 2022 relatif à l’information des acquéreurs et des locataires sur les risques.

 

Ce décret met à jour le dispositif d’information des acquéreurs et des locataires préalablement à l’acte de location ou de vente d’un bien immobilier.

 

Ce décret entre en vigueur au 1er janvier 2023.

 

Il met à jour la procédure d’élaboration de l’état des risques prévu par l’article L. 125-5 du code de l’environnement

 

Il rend obligatoire pour le vendeur ou le bailleur d’un bien immobilier concerné par un ou plusieurs risques naturels ou technologiques ou par un secteur d’information sur les sols d’en informer le potentiel acquéreur ou locataire à chaque étape de la vente ou de la location, et cela dès l’annonce immobilière.

 

Il précise le contenu du document faisant état de ces risques ou décrivant le secteur d’information sur les sols et les conditions dans lesquelles celui-ci doit être remis au potentiel acquéreur ou locataire afin d’assurer sa bonne information.

 

L’état des risques doit ainsi mentionner la date de son élaboration, le numéro de la ou des parcelles concernées et les sons ou périmètres cités à l’article R. 125-23 du code de l’environnement sur lesquels se situe le bien.

 

Il comprend, selon les cas  :

  • Pour chacun des plans de prévention des risques mentionnés aux 1° à 4° de l’article R. 125-23 dans le périmètre duquel se trouve le bien, un extrait de document graphique situant ce bien par rapport au zonage réglementaire et l’extrait du règlement le concernant, ainsi qu’une information indiquant si des travaux sont prescrits par ce règlement pour ce bien et s’ils ont été réalisés.
  • La fiche d’information sur le risque sismique disponible sur le site www.georisques.gouv.fr si le bien est situé dans une commune classée en zone de sismicité de niveau 2, 3, 4 ou 5.
  • La fiche d’information sur le radon si le bien est situé dans une commune classée en zone à potentiel radon de niveau 3.
  • Pour les biens situés dans l’une des zones mentionnées au 7° de l’article R. 125-23, l’indication de l’horizon temporel d’exposition au recul du trait de côte identifié et le rappel des prescriptions applicables à cette zone, ainsi que la mention du caractère provisoire du zonage lorsque celui est préfiguré au sens des articles L. 121-22-3 ou L. 121-22-7 du code de l’urbanisme et la mention de l’application éventuelle au bien des dispositions de l’article L. 121-22-5.
  • La liste des arrêtés portant reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle pris dans la commune qui ont affecté le bien concerné et qui ont donné lieu au versement d’une indemnité en application de l’article L. 125-2 ou L. 128-2 du code des assurances.

L’annonce relative à la vente ou la location d’un bien pour lequel doit être établi l’état des risques, quel que soit son support de diffusion, comporte la mention “Les informations sur les risques auxquels ce bien est exposé sont disponibles sur le site géorisques : www.georisques.gouv.fr”.

 

L’état des risques, remis lors de la première visite de l’immeuble doit être établi depuis moins de six mois.

 

Il doit être actualisé par le promettant, le réservant, le vendeur ou le bailleur, si les informations qu’il contient ne sont plus exactes à la date de la signature de la promesse de vente, du contrat préliminaire en cas de VEFA, de l’acte authentique ou du contrat de bail.

 

Relativement à l’information des acquéreurs et locataires sur la pollution des sols le document d’information mentionne la date de son élaboration et le numéro de la ou des parcelles concernées, le dernier arrêté pris par le préfet déterminant les secteurs d’information sur les sols pris en application de l’article R. 125-45 ou R. 125-47 ainsi que les dispositions de l’article L. 556-2 du code de l’environnement.

 

Le document d’information est annexé à la promesse de vente ou au contrat préliminaire en cas de VEFA ainsi qu’à l’acte authentique de vente.

Le promettant ou vendeur s’assure de la validité des informations qu’il contient à la date de signature de chacun de ces actes et le met à jour si nécessaire.

Ces obligations s’imposent également au bailleur.

 

Jurisprudences : 

 

Compétence du notaire jusqu’au 1er juillet 2022 pour procéder à l’adjudication de parts sociales saisies : Cass. civ. 2ème, 19 mai 2022, n° 20-20.343

 

Suite à la condamnation de M. F au paiement d’une certaine somme, des parts sociales qu’il détenait ont été saisies.

La vente par adjudication de ces parts sociales a été réalisée par la chambre départementale des notaires de la Somme.

 

M. F a reproché à la cour d’appel d’avoir rejeté sa demande d’annulation des procès verbaux d’adjudication au motif que la vente forcée des droits d’associés et des valeurs mobilières est une procédure engagée par un huissier de justice et qu’aucun texte ne donne compétence aux notaire pour réaliser l’adjudication de ces biens.

 

La Cour de cassation a considéré qu’aux termes de l’article 29 de la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000 relative aux ventes judiciaires aux enchères publiques en vigueur jusqu’au premier juillet 2022 conformément à l’ordonnance n° 2016-728 du 2 juin 2016, les commissaires-priseurs judiciaires ont, avec les autres officiers publics ou ministériels et les autres personnes légalement habilitées, seuls compétence pour organiser et réaliser les ventes judiciaires de meubles corporels ou incorporels aux enchères publiques, et faire les inventaires et prisées correspondantes.

 

Les notaires, ayant le statut d’officiers publics, ont dès lors le pouvoir de réaliser l’adjudication des parts sociales.

 

Cautionnement notarié et précisions des caractéristiques de l’engagement dans un acte sous seing privé : Cass. com. 21 septembre 2022, n° 21-13.024 : 

 

Par acte notarié du 30 aout 2012, une société a acquis un fonds de commerce. Cette acquisition a été financée par un prêt de 91 000 € au taux nominal de 3,05% l’an, remboursable en 84 mois consenti par le CIC est.

 

Aux termes de cet acte notarié, M. T. s’est porté caution de la société dans la limite de 12 000 € et pour une durée précisée « par la caution elle-même dans la mention manuscrite qui précède sa signature dans le contrat de crédit ».

 

Après la mise en liquidation judiciaire de la société, la banque a fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes bancaires de M.T., lequel a obtenu sa main levée en raison de l’absence de précision de l’engagement de la caution sur sa portée et son étendue.

 

La banque reproche à la cour d’appel d’avoir annuler la caution en  se fondant sur le fait que la nécessité d’une mention manuscrit était entrée dans le champ contractuel par la volonté des parties et que l’absence de cette mention entrainait la nullité du cautionnement.

 

 

La banque considérait au contraire que l’acte reçu en la forme  authentique reçu par un notaire était dispensé de mention manuscrite  précisant la durée et la portée de l’engagement de la caution.

 

La Cour de cassation rejette cette position en considérant que bien que l’article 1317-1 du code civil dans sa rédaction antérieure à la réforme de 2016 permet de dispenser les parties de la mention manuscrite dans un contrat de cautionnement reçu en la forme authentique, ce texte n’interdit pas aux parties de prévoir, dans l’acte notarié, que certaines caractéristiques de l’engagement  de la caution soient précisées dans un acte sous seing privé passé entre les parties.

 

En l’espèce, l’acte notarié prévoit que l’engagement de la caution est prévu pour une durée déterminée dans la mention manuscrite qui précède sa signature dans le contrat de crédit. Elle en déduit que les parties n’ont pas envisagé d’engagement pour une durée illimitée mais au contraire que cette durée sera précisée par une mention manuscrite, ce qui n’implique pas au demeurant une durée de l’engagement égale à celle du prêt.

 

Elle en conclu que l’absence de cette mention manuscrite à laquelle renvoie l’acte notarié pour la détermination de la durée de l’engagement de caution, affecte la preuve de son étendue ; celle-ci, ainsi indéterminée entraîne donc la nullité de l’engagement de la caution.

 

Représentation successorale : quand le fiscal défie le civil, étude par MM S. Richard e B. Mocotte, cahier du cridon Lyon, n° 91

La représentation est un mécanisme successoral définie par l’article 751 du code civil comme « une fiction juridique qui a pour effet d’appeler à la succession les représentants aux droits du représenté ».

Elle a pour fonction d’appeler à la succession ab intestat des personnes qui auraient été écartées en raison de la règle du degré.

La loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 a admis la représentation de l’indigne.

La loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 a quant à elle admis la représentation du renonçant.

  1. L’exclusion de la représentation

L’article 752-1 du code civil exclu la représentation en ligne ascendante.

L’article 752-1 a contrario du code civil exclu de la représentation les collatéraux autres que les frères et sœurs du défunt et leurs descendants.

L’article 752 alinéa 1er exige la condition de conception du représentant au jour du décès.

Par exemple : une personne décède en 2015 laissant deux enfants, le premier accepte immédiatement la succession, le second y renonce en 2020. Si ce dernier a eu un enfant en 2019, il ne pourra venir le remplacer dans la succession, la condition de conception au jour du décès n’étant pas remplie.

Le conjoint survivant indigne ou renonçant ne peut pas être représenté.

Aussi la représentation ne joue que pour la dévolution légale mais non la dévolution testamentaire, le legs étant caduc en cas de prédécès du légataire en vertu de l’article 1039 du code civil.

De même le légataire renonçant ne peut pas être représenté.

Néanmoins le testateur peut prévoir le jeu de la représentation dans les stipulations du testament, il s’agit d’une substitution vulgaire (Cass. req. 8 novembre 1921 : DP 1922, 1, p. 183).

Sous l’angle fiscal 

L’administration considère que la représentation n’existe pas à l’égard des dispositions testamentaires.

Elle précise que lorsque le testateur fait jouer la substitution vulgaire, les descendants du légataire bénéficient du legs par la volonté du testateur mais non par l’effet de la représentation (BOI-ENR-DMTG-10-50-80, §310 du 24 aout 2017).

En matière d’assurance-vie :

L’article L. 132-9 du codes des assurances conditionne de manière supplétive l’attribution du bénéfice d’une assurance-vie à la condition de l’existence du bénéficiaire à l’époque de l’exigibilité du capital ou de la rente garantie.

La représentation est ainsi par principe exclue en droit des assurances (Cass. civ. 2ème, 22 septembre 2005, n° 04-13.077).

Toutefois, comme en matière testamentaire, la représentation peut être prévue par le souscripteur, auquel cas les descendants du bénéficiaires peuvent demander une quote-part du bénéfice du contrat (Cass. civ. 2ème, 10 avril 2008, n° 07-12.992).

Sous l’angle fiscal en cas de clause bénéficiaire visant « mes enfants ou représentés », l’administration fiscale considère qu’il n’y a pas représentation (BOI-ENR-DMTG-10-50-80, § 340, 24 aout 2017). 

Les sommes versées sont considérées comme étant extérieures à la succession en revenant aux bénéficiaires en vertu d’une stipulation pour autrui ; les bénéficiaires sont des créanciers à l’égard de la compagnie d’assurance mais non contre la succession.

Si un héritier représentant de la dévolution successorale est également légataire ou bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie, l’administration fiscale invite à procéder à une double liquidation (BOI-ENR-DMTG-10-50-80, § 390, 24 aout 2017) :

  • Pour les dévolutions en ligne directe (petit fils qui vient à la succession de son grand père par représentation de son père prédécédé) elle :
    • Applique l’abattement prévu pour les enfants au I de l’article 779 du CGI sur la part attribuée par succession en représentation.
    • Applique l’abattement prévu au IV de l’article 788 du CGI (à défaut d’un autre abattement applicable) sur les sommes versées en raison d’un contrat d’assurance-vie et imposées en vertu des dispositions de l’article 757 B du CGI ou de l’article 990 I du CGI.
  • En ligne collatérale (neveu vient à la succession de son oncle par représentation du frère prédécédé de ce dernier) il faut distinguer deux masses taxables :
    • La transmission des biens reçus par voie légale pour lesquels la représentation s’applique est imposée selon l’abattement et le tarif prévu pour les frères et sœurs. 
    • Les biens reçus par voie de legs ainsi que les sommes reçues au titre de l’assurance-vie seront, au-delà de l’abattement spécifique de 30 500€ réparti entre les différents bénéficiaires de contrats d’assurance-vie, selon l’abattement personnel et le tarif prévu pour les neveux.

Concernant la double liquidation en ligne directe on peut toutefois s’interroger s’il faut additionner la part nette taxable à raison de la vocation légale et la part nette à raison des primes imposables de l’assurance vie puis imposer un seul barème en ligne directe ou, à l’inverse, appliquer un barème distinct en ligne directe à chaque part nette taxable ?

De nombreux auteurs considèrent qu’il faut retenir l’application d’un barème distinct à chaque part nette taxable, la liquidation des droits de mutation ne pouvant s’arrêter à l’application d’abattements.

  1. La représentation en ligne directe descendante

Celle-ci a lieu à l’infini en vertu de l’article 752 al. 1er du code civil et, lorsqu’elle est admise, le partage s’opère par souche, comme si le représenté venait à la succession et à l’intérieur de la souche, le partage se fait par tête en vertu de l’article 753 du code civil.

L’article 752 al. 2 c. civ. vise « les enfants du défunt », ce qui impose la condition dite de pluralité de souches, le défunt devant avoir eu plusieurs enfants.

Ainsi, lorsque le de cujus n’a eu qu’un enfant et que celui-ci est prédécédé, indigne ou renonçant, ses propres enfants viennent à la succession de leur propre chef.

La condition de pluralité de souches est rappelée par la Cour de cassation, celle-ci jugeant qu’« il ne peut y avoir de représentation dans la ligne directe descendante que si le défunt a eu plusieurs enfants » (Cass. civ. 1ère, 25 sept. 2013, n° 12-17.556).

Sous l’angle fiscal :

Il est dérogé à ce principe pour les héritiers en ligne directe descendante, l’administration considérant que « dans la situation où un petit enfant est appelé à la succession de son grand-père du fait du prédécès de son père, enfant unique, il est admis l’application de l’abattement prévu au I de l’article 779 du CGI en faveur de l’enfant prédécédé sur la part successorale revenant au petit-enfant » (BOI-ENR-DMTG-10-50-80, § 330, 24 août 2017).

Cette tolérance s’applique également lorsque le petit-enfant succède à son aïeul par suite de la renonciation de son auteur, enfant unique du défunt (Rép. Min. QE n° 86052, JOAN Q, 23 nov. 2010, p. 12822 ; BOI-ENR-DMTG-10-50-80, §280, 24 aout 2017).

L’administration fiscale admet ainsi l’application de l’abattement de l’article 779 I du CGI en présence d’une souche unique en ligne directe descendante.

Cet abattement se divise entre les représentants d’après les règles de la dévolution légale en vertu des I et IV de l’article 779 du CGI.

Du point de vue des tranches du barème :

La question peut se poser de savoir si les petits enfants qui viennent par représentation bénéficient chacun des premières tranches d’imposition ou s’il faut répartir ces tranches entre eux ?

Après la répartition de l’abattement selon les règles de la dévolution légale entre les représentants, il est obtenu pour chacun d’eux leur part nette. Ensuite, par application littérale de l’article 777 du CGI il est fait application sur la part nette du barème d’imposition.

Chaque tranche du tarif doit s’appliquer à la part nette de chacun des représentants.

L’administration fiscale, sans s’être expressément prononcée sur les modalités pratiques d’application du barème, retient cette solution dans un exemple chiffré en présence d’une représentation en ligne directe, en appliquant le barème progressif sur la part successorale revenant à chaque héritier succédant par représentation (BOI-ENR-DMTG-10-20-50-20, § 20, 12 sept. 2012).

Exemple 1 :

Viennent à la succession d’Albert : Simone, sa fille ainsi que Thomas et Sophie, ses petits-enfants, par représentation de leur mère Annie, prédécédée.

Simone recueille la moitié de la succession, Thomas et Sophie se partagent l’autre moitié, soit un quart chacun.

Thomas et Sophie se partagent l’abattement de 100 000€ à part égale. Chacun d’eux bénéfice du barème en ligne directe.

Exemple 2 :

Viennent à la succession d’Albert : Thomas et Sophie, ses petits-enfants. Ils ne viennent pas par représentation de leur mère Annie, prédécédée, mais de leur chef puisque leur grand-père n’a eu qu’une fille (absence de pluralité de souches).

Thomas et Sophie se partagent la succession moitié chacun. Par tolérance, les petits-enfants bénéficient de l’abattement de 100 000€ chacun pour une moitié (50 000€). Chaque héritier se voit appliquer le barème en ligne directe.

Quid lorsque le défunt n’a eu qu’un enfant et que celui-ci a eu plusieurs descendants dont certains ne viennent pas à la succession en laissant eux-mêmes un ou plusieurs enfants ?

L’application littérale de l’article 752 al. 2 c. civ. et de la jurisprudence tend à exclure le ou les arrière-petits-enfants en raison du non-respect de la condition de pluralité de souches.

Or l’article 753 semble admettre qu’il peut y avoir une subdivision de souches, une sorte de « représentation dans la représentation ».

Aussi il semble envisageable de faire venir les arrière-petits-enfants à la place de leurs auteurs respectifs.

Sur le plan fiscal, compte tenu de la tolérance précitée, les arrière-petits-enfants bénéficient de l’abattement de 100 000 € même en cas d’unité de souche.

Exemple 3 :

Viennent à la succession d’Albert : Thomas, son petits-fils, de son chef ; Arthur, son arrière-petit-fils, par représentation de sa mère Sophie, prédécédée, qui serait venue de son chef à la succession de son grand-père (comme son frère Thomas), si elle lui avait survécu.

Thomas et Arthur recueillent la moitié de la succession.

La tolérance de l’Administration fiscale est applicable. L’abattement de 100 000 € se répartit en fonction de la dévolution légale, soit pour une moitié chacun (50 000€). Chaque héritier bénéficie du barème en ligne directe.

Exemple 4 :

Viennent à la succession d’Albert : Romane et Emilie, ses arrière-petites-filles, par représentation de leur père Thomas, prédécédé, qui serait venu de son chef à la succession de son grand-père, s’il lui avait survécu ; Arthur, son arrière-petit-fils, par représentation de sa mère Sophie, prédécédée, qui serait venue de son chef à la succession de son grand-père si elle lui avait survécu.

Romane et Emilie recueillent ensemble la moitié de la succession, qu’elles se partagent par tête, et Arthur l’autre moitié.

La tolérance de l’administration fiscale s’applique. L’abattement de 100 000 € se divise selon les règles de la dévolution légale : Romane et Emilie bénéficient de 25 000 € d’abattement et Arthur de 50 000€.

Cette position a été retenu par un comité scientifique rassemble des juristes du service droit civil, des professeurs et des notaires qui s’est tenu le 4 mars 1988, elle a été réitérée le 29 janvier 2018.

  1. La représentation en ligne collatérale privilégiée

Elle a lieu à l’infini et le partage s’opère par souche, puis par tête à l’intérieur d’une souche.

La condition de pluralité de souche est également posée ; le défunt doit avoir eu plusieurs frères et/ou sœurs ayant laissé une postérité.

Cette condition a été réaffirmée par la Cour de cassation la première chambre civile ayant jugée dans un arrêt du 14 mars 2018 qu’ « il ne peut y avoir représentation, en ligne collatérale, en présence d’une seule souche » (n° 17-14.583).

Contrairement à la représentation en ligne directe, l’administration fiscale ne prévoit pas d’exception à la condition de pluralité de souche en matière de représentation collatérale.

L’abattement de l’auteur prédécédé ou renonçant se divise alors entre les représentants d’après les règles de la dévolution légale (art. 779 I et IV du CGI).

L’administration fiscale refuse de cumuler la quote-part de l’abattement du représenté avec l’abattement personnel du représentant (abattement neveu/nièce) afin que le mécanisme de la représentation ne conduise pas l’héritier à obtenir un avantage supérieur à celui qui aurait été applicable en matière de représentation (BOI-ENR-DMTG-20-30-20-10, § 50, 29 septembre 2014).

Si le partage de l’abattement du renonçant ou du prédécédé entre ses représentants aboutit à ce que chacun d’eux dispose d’un abattement inférieur à celui prévu par le IV de l’article 788 du CGI (1 594€), il y a toutefois lieu d’appliquer sur la part de chacun ce dernier abattement (hypothèse où il y aurait plus de neuf neveux/nièces au sein de la même souche).

A défaut de position de l’administration sur les modalités d’application du tarif, la solution est identique à celle retenue en matière de ligne directe : chaque neveu ou nièce, après imputation de sa quote-part d’abattement bénéficiera des tranches de 35 et 45 % (instruction 7 G-7-09, n° 70 du 16 juillet 2009 antérieure et non reprise au BOFIP-impôts).

Exemple 5 :

Viennent à la succession d’Annie : Romuald, son neveu, par représentation de son père Francis, frère prédécédé de la défunte ; Noémie et Édouard, par représentation de leur mère Simone, sœur prédécédée de la défunte.

Romuald recueille la moitié de la succession et l’autre moitié est partagée entre Noémie et Edouard, soit un quart pour chacun.

Romuald bénéficie de l’abattement prévu pour les frères et sœurs (15 932€). Noémie et Edouard en bénéficient respectivement à hauteur d’une moitié chacun, soit 7 966€.

La part nette taxable de chacun d’eux est soumise au barème entre frères et sœurs (soit 35% jusqu’à 24 430 €, et 45% pour le surplus).

Exemple 6 :

Viennent à la succession d’Annie : Romuald, son neveu, par représentation de son père Francis, frère prédécédé de la défunte ; Lucas et Théo, ses petits-neveux, par représentation de leurs grand-mère Simone et mère Noémie, sœur et nièce prédécédées de la défunte ; Edouard, son neveu, par représentation de sa mère Simone, sœur prédécédée de la défunte.

Romuald recueille la moitié de la succession et l’autre moitié est dévolue à la souche de Simone : pour une moitié à Lucas et Théo, enfants de Noémie, pour un huitième chacun, et pour l’autre moitié, soit un quart, à Edouard.

L’abattement se divise selon les règles de la dévolution légale.

Romuald bénéficie de l’abattement prévue pour les frères et sœurs (15 932€).

Edouard a droit à la moitié de l’abattement de son auteur, soit 7 966€.

Lucas et Théo ont respectivement droit à un quart dudit abattement, soit 3 983€.

La part nette taxable de chacun d’eux est soumise au barème entre frères et sœurs (soit 35% jusqu’à 24 430€ et 45% pour le surplus).

Exemple 7 :

Viennent à la succession d’Annie :  Noémie et Edouard, ses nièce et neveu. Ils ne viennent pas par représentation de leur mère Simone, prédécédée, mais de leur propre chef, puisque leur tante n’a eu qu’une sœur (leurs parents n’ont généré qu’une souche).

Noémie et Edouard se partagent la succession pour moitié chacun.

En leur qualité de neveu et nièce, l’abattement est de 7 967 €.

Leur part nette est imposée au taux de 55%.

Quid lorsque le défunt n’a laissé qu’un frère ou une sœur prédécédé, renonçant ou indigne, qui a lui-même laissé plusieurs descendants dont l’un est aussi prédécédé, renonçant ou indigne en laissant une postérité ?

En somme que ce passe-t-il lorsque la famille du défunt n’est composée que de neveux/nièces et de petits-neveux/nièces issus de neveux/nièces prédécédés, renonçants ou indignes ?

A priori une lecture stricte de l’article 752-2 et de la jurisprudence aboutirait à ce que des neveux/nièces excluent les petits-neveux/nièces.

À l’instar de ce qui avait été développé en matière de ligne directe il est concevable que les petits-neveux/nièces (voire les arrières petits-neveux/nièces) dont les auteurs sont prédécédés viennent à la succession en concours avec les neveux/nièces par le mécanisme de la représentation malgré la présence d’une unique souche issue du frère ou de la sœur du de cujus.

En matière fiscale bien que la Cour de cassation ait écarté le jeu de la représentation successorale telle que conçue en droit fiscal, la dévolution successorale au profit d’une neveu et de petits-neveux en raison de la renonciation de la sœur unique du défunt n’a pas été contesté. Or cela revient civilement à faire jouer la représentation successorale au profit des petits-neveux (Cass. Civ. 1ère, 3 octobre 2019, n° 18-18.736). Cette solution avait également été adoptée à l’occasion du comité scientifique du 29 janvier 2018.

Mais, sur le plan fiscal, s’il n’y a qu’un souche, les petits-neveux/nièces ne bénéficieront pas de l’abattement entre frères et sœurs, ni de l’abattement de leur père ou mère (c’est-à-dire l’abattement applicable aux neveux et nièces) puisqu’on ne représente jamais un neveu au plan fiscal.

En présence d’une pluralité de souches, le BOFIP-impôts ne se positionne pas sur le cas des petits-neveux/nièces venant par représentation mais la doctrine antérieure considérait que depuis le 1er janvier 2007 les représentants d’un renonçant ou d’un prédécédé en ligne collatérale pouvaient se partager l’abattement personnel dont ce dernier aurait bénéficié.

Ainsi les petits-neveux/nièces ou les arrières petits-neveux/nièces venant à la succession de leur oncle ou de leur tante par représentation de leur auteur bénéficient de l’abattement de 15 697€ qu’ils se partagent.

Ils peuvent donc bénéficier d’une quote-part de l’abattement frère/sœur à condition qu’il y ait pluralité de souches.

Exemple 8 :

Viennent à la succession d’Annie : Noémie et Bruno, ses nièce et neveu, de leur chef. Ils bénéficient chacun de l’abattement neveux/nièces (7 967€), et leur part nette est imposée au tarif prévu pour les neveux et nièces (55%).

Enzo et Jeanne, ses petit-neveu et petite-nièce, par représentation d’Edouard, leur père, prédécédé, qui serait venu de son chef à la succession de sa tante s’il lui avait survécu. Ils bénéficient chacun d’un abattement de 1 594€ et sont imposés à 55%.

Noémie et Bruno recueillent chacun le tiers de la succession et le dernier tiers est partagé entre Enzo et Jeanne, soit un sixième pour chacun.

  1. La représentation et le rappel fiscal des donations antérieurs.

Pour la détermination du solde d’abattement disponible et des tranches du tarif, il doit être tenu compte des abattements pratiqués sur les donations antérieures de moins de 15 ans consenties par la même personnel au même bénéficiaire ainsi que des tranches du barème consommées en vertu de l’article 748 du CGI.

Lorsque la personne représentée a bénéficié de donations de moins de 15 ans de la part du de cujus, ses représentants sont tenus au rappel fiscal de ces donations.

L’administration fiscale considère que dans une telle hypothèse, il faut tenir compte pour déterminer le montant de l’abattement restant disponible, des abattements dont son auteur a bénéficié antérieurement à raison de transmissions provenant du même disposant (BOI-ENR-DMTG-10-50-50, § 110, 13 février 2017).

Elle ne se prononce toutefois pas sur le barème consommé par l’auteur représenté. Deux voies sont alors possibles : 

  • Soit il faut considérer que le barème est vierge et le rappel fiscal de la donation de leur auteur est sans incidence sur les tranches d’imposition de leur barème.
  • Soit le rappel fiscal impose de prendre en compte les tranches consommées par leur auteur, auquel cas ils ne bénéficient que des tranches non consommées.

Ce silence ne permettrait pas d’écarter l’application de l’article 784 du CGI qui vise les tranches du barème consommées ; la solution contraire revenant à appliquer partiellement le barème fiscal, il est recommandé de prendre en compte les tranches du barème par l’auteur prédécédé ou renonçant.

 

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