- TEXTES
Modification du format et du contenu de la fiche standardisĂ©e d’information relative Ă l’assurance ayant pour objet le remboursement d’un prĂȘt
Un arrĂȘtĂ© du 27 mai 2022 modifie l’arrĂȘtĂ© du 29 avril 2015 modifiĂ© prĂ©cisant le format et le contenu de la fiche standardisĂ©e d’information relative Ă l’assurance ayant pour objet le remboursement d’un prĂȘt.
Il prĂ©voit notamment que la garantie invaliditĂ© telle que prĂ©vue au contrat d’assurance emprunteur est indĂ©pendante de la notion d’invaliditĂ© retenue par la SĂ©curitĂ© sociale ou tout autre organisme compĂ©tent qui juge de l’inaptitude professionnelle. La reconnaissance d’un Ă©tat d’invaliditĂ© par l’un de ces organismes ne s’impose pas Ă l’assureur, qui est tenu par la seule dĂ©finition figurant au contrat.
Ătablissement numĂ©rique obligatoire des certificats de dĂ©cĂšs
Le dĂ©cret n° 2022-284 du 28 fĂ©vrier 2022 renforçant l’obligation d’Ă©tablir les certificats de dĂ©cĂšs par voie Ă©lectronique, en prĂ©cisant que l’Ă©laboration ou la transmission du certificat de dĂ©cĂšs sur support papier est exceptionnelle, est entrĂ© en vigueur le 1er juin 2022.
Cette obligation s’applique lorsque le dĂ©cĂšs a eu lieu dans un Ă©tablissement de santĂ© public ou privĂ© ou dans un Ă©tablissement mĂ©dico-social. Lorsque le mĂ©decin, l’Ă©tudiant ou le praticien sont, pour des raisons techniques, dans l’impossibilitĂ© de transmettre un certificat de dĂ©cĂšs par voie Ă©lectronique, ils peuvent procĂ©der Ă son Ă©dition.
- JURISPRUDENCE
Dons familiaux de sommes dâargent : pas de prorogation de l’exonĂ©ration temporaire de DMTG
L’exonĂ©ration temporaire et conditionnelle de droits de mutation Ă titre gratuit en faveur des dons familiaux de sommes d’argent consentis en pleine propriĂ©tĂ© ne serait pas prorogĂ©e au-delĂ du 30 juin 2021.
Jusqu’au 30 juin 2021, les dons de sommes d’argent consentis en pleine propriĂ©tĂ© Ă un enfant, un petit-enfant, un arriĂšre-petit-enfant ou, Ă dĂ©faut d’une telle descendance, un neveu ou une niĂšce, sont exonĂ©rĂ©s de droits de mutation Ă titre gratuit dans la limite de 100 000 âŹ, sous rĂ©serve que les sommes soient affectĂ©es par le donataire, au plus tard le dernier jour du troisiĂšme mois suivant le transfert, Ă l’un des emplois prĂ©vus par ces dispositions, notamment la souscription au capital d’une petite entreprise dont le donataire est le dirigeant ou dans laquelle il exerce son activitĂ© professionnelle principale ou la construction de sa rĂ©sidence principale (CGI, art. 790 A bis).
Mise en place par lâarticle 19 de la loi de finances rectificative pour 2020, cette exonĂ©ration temporaire s’applique aux sommes versĂ©es entre le 15 juillet 2020 et le 30 juin 2021.
Le gouvernement n’envisage pas de proroger ce dispositif aprĂšs cette date.
Interruption du dĂ©lai de prescription de la crĂ©ance d’un indivisaire
Aux termes de l’article 2241 du Code civil, la demande en justice, mĂȘme en rĂ©fĂ©rĂ©, interrompt le dĂ©lai de prescription ainsi que le dĂ©lai de forclusion. Il en rĂ©sulte qu’une assignation en liquidation et partage d’une indivision n’interrompt la prescription de crĂ©ances invoquĂ©es par un indivisaire Ă l’encontre de l’indivision, au titre du remboursement de prĂȘts, que si elle contient une rĂ©clamation, ne serait-ce qu’implicite, Ă ce titre.
Telle est la solution posĂ©e par la Cour de cassation dans un arrĂȘt du 18 mai 2022.
En l’espĂšce, des concubins ont acquis un bien immobilier en indivision. Ă la suite de leur sĂ©paration, le concubin a assignĂ© la concubine en liquidation et partage de l’indivision. Pour ordonner l’homologation du projet de partage Ă©tabli le 13 octobre 2016 par le notaire, l’arrĂȘt d’appel relĂšve que le concubin a engagĂ© l’action en liquidation et partage de l’indivision par assignation du 29 octobre 2007 et retient que, la procĂ©dure n’ayant pas abouti Ă ce stade au partage de l’indivision, la prescription n’a pas repris son cours, de sorte qu’il est recevable Ă invoquer des impenses au titre de prĂȘts.
La Cour de cassation casse l’arrĂȘt d’appel. En retenant que l’action du concubin en liquidation et partage de l’indivision, par assignation, a interrompu le dĂ©lai de prescription, de sorte qu’il est recevable Ă invoquer des impenses au titre de prĂȘts, sans constater que l’assignation contenait une rĂ©clamation, ne serait-ce qu’implicite, Ă ce titre, la cour d’appel prive sa dĂ©cision de base lĂ©gale.
Pouvoir du notaire et adjudication de parts sociales
Il rĂ©sulte de l’article 29 de la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000 relative aux ventes judiciaires aux enchĂšres publiques, en vigueur jusqu’au 1er juillet 2022, que les notaires ont, comme tout autre officier public ou ministĂ©riel, le pouvoir de rĂ©aliser l’adjudication des parts sociales.
Telle est la solution posĂ©e par la Cour de cassation dans un arrĂȘt du 19 mai 2022.
Aux termes de l’article susvisĂ©, les commissaires-priseurs judiciaires ont, avec les autres officiers publics ou ministĂ©riels et les autres personnes lĂ©galement habilitĂ©es, seuls compĂ©tence pour organiser et rĂ©aliser les ventes judiciaires de meubles corporels ou incorporels aux enchĂšres publiques, et faire les inventaires et prisĂ©es correspondants.
Il en rĂ©sulte que les notaires, qui, selon l’article 1er de l’ordonnance n° 45-290 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat, sont des officiers publics, ont, comme tout autre officier public ou ministĂ©riel, le pouvoir de rĂ©aliser l’adjudication des parts sociales.
L’atteinte Ă l’environnement de la dĂ©molition/reconstruction
Dans une dĂ©cision du 12 mai 2022, le Conseil dâEtat a Ă©noncĂ© que la conformitĂ© d’un permis de construire, portant Ă la fois sur une construction et la dĂ©molition d’un bĂątiment existant, aux prescriptions prohibant l’atteinte au caractĂšre ou Ă l’intĂ©rĂȘt des lieux avoisinants, aux sites ou aux paysages naturels et urbains, comme aux perspectives monumentales (C. urb., art. R. 111-27), s’apprĂ©cie en fonction de l’impact sur le site, non de la seule dĂ©molition, mais aussi de son remplacement par la construction autorisĂ©e.
Petit contrÎle du juge sur la dérogation à la rÚgle générale du PLU
Il sâagit dâune dĂ©cision du 12 mai 2022 du Conseil dâEtat portant sur le contrĂŽle de lâautoritĂ© administrative.
Quand l’autoritĂ© administrative a la facultĂ© de prendre ou non une dĂ©cision dans un sens dĂ©terminĂ©, le juge de l’excĂšs de pouvoir n’exerce qu’un contrĂŽle restreint sur l’usage, ou pas, de cette facultĂ©. Ainsi, comme dans la prĂ©sente affaire, quand le document d’urbanisme permet Ă l’autoritĂ© administrative d’appliquer ou pas « Ă son grĂ© » une dĂ©rogation Ă la rĂšgle gĂ©nĂ©rale, le juge de l’excĂšs de pouvoir ne sanctionne la dĂ©cision prise dans ce contexte que si elle est entachĂ©e d’une erreur manifeste d’apprĂ©ciation (CE, sect., 4 oct. 1974, n° 86957, Min. Ă©quipement : Lebon, p. 467).
La question portait ici sur l’implantation des constructions par rapport aux emprises publiques et aux voies, la rĂšgle gĂ©nĂ©rale exigeant une distance maximale de 5 mĂštres par rapport Ă la limite de rĂ©fĂ©rence et les rĂšgles particuliĂšres permettant d’autoriser ou d’imposer des modalitĂ©s diffĂ©rentes dans des situations dĂ©terminĂ©es. L’autorisation de construire sollicitĂ©e avait Ă©tĂ© refusĂ©e sur le fondement de la rĂšgle gĂ©nĂ©rale. La dĂ©cision ne pouvait ĂȘtre censurĂ©e que si le refus d’application des rĂšgles particuliĂšres caractĂ©risait une erreur manifeste d’apprĂ©ciation. Ce n’Ă©tait apparemment pas le cas.
Rejet du REP formĂ© contre le dĂ©cret relatif Ă la mise en place de l’encadrement expĂ©rimental des loyers
CE, 10 mai 2022, n° 431495 : Lebon T.
Une association a attaquĂ© en excĂšs de pouvoir le dĂ©cret n° 2019-315 du 12 avril 2019 fixant le pĂ©rimĂštre du territoire de la ville de Paris sur lequel est mis en place le dispositif d’encadrement des loyers prĂ©vu Ă l’article 140 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant Ă©volution du logement, de l’amĂ©nagement et du numĂ©rique. Pour rejeter ce recours, le Conseil d’Ătat s’est prononcĂ© sur des moyens dont certains ont mĂ©ritĂ© un fichage.
Se posait la question de l’atteinte au sacro-saint droit de propriĂ©tĂ©. Si les dispositions de l’article 140 de la loi du 23 novembre 2018 « permettent aux prĂ©fets de fixer des âloyers de rĂ©fĂ©renceâ qui seront susceptibles de limiter l’exercice du droit de propriĂ©tĂ©, cette limitation, au demeurant introduite par la loi Ă titre expĂ©rimental, prĂ©sente un rapport raisonnable de proportionnalitĂ© avec l’exigence d’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral qu’elle poursuit. Par suite, elles ne sont pas incompatibles avec la protection du droit de propriĂ©tĂ© rĂ©sultant des stipulations de l’article 1er du premier protocole additionnel Ă la convention europĂ©enne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertĂ©s fondamentales ».
L’Ă©valuation de la valeur de l’usufruit de titres non cotĂ©s devant le juge de l’impĂŽt
CE, 9e et 10e ch., 20 mai 2022, n° 449385 , Sté civile Ambroise C et M. et Mme C
L’Administration peut ĂȘtre amenĂ©e Ă Ă©valuer la valeur d’usufruit des titres d’une sociĂ©tĂ© non cotĂ©e, par exemple pour apprĂ©cier si le prix d’acquisition de cet usufruit a Ă©tĂ© volontairement minorĂ© par les parties pour dissimuler une libĂ©ralitĂ© faite par le vendeur Ă l’acquĂ©reur. Dans ce cas, l’Administration est fondĂ©e Ă corriger la valeur d’origine de l’immobilisation, comptabilisĂ©e par l’entreprise acquĂ©reuse pour son prix d’acquisition, pour y substituer sa valeur vĂ©nale, augmentant ainsi son actif net dans la mesure de l’acquisition faite Ă titre gratuit.
Preuve du respect de lâobligation d’information annuelle de la caution
Cass. 1re civ., 25 mai 2022, n° 21-11.045, B
Il rĂ©sulte de l’article L. 313-22 du code monĂ©taire et financier qu’il appartient aux Ă©tablissements de crĂ©dit et aux sociĂ©tĂ©s de financement ayant accordĂ© un concours financier Ă une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, de justifier de l’accomplissement des formalitĂ©s lĂ©galement prĂ©vues et que la seule production de la copie de lettres d’information ne suffit pas Ă justifier de leur envoi.
Prescription des créances entre époux séparés de biens : précisions
Cass. 1re civ., 18 mai 2022, n° 20-20.725, B
Les crĂ©ances entre Ă©poux sĂ©parĂ© de biens et dont le rĂšglement ne constitue pas une opĂ©ration de partage se prescrivent, en matiĂšre personnelle ou mobiliĂšre et en l’absence de disposition particuliĂšre, selon le dĂ©lai de droit commun, Ă savoir 5 ans. Ce dĂ©lai commence Ă courir lorsque le divorce a acquis force de chose jugĂ©e.
Au cas dâespĂšce, un jugement du 22 octobre 2009 a ordonnĂ© l’ouverture des opĂ©rations de comptes, liquidation et partage de l’indivision existant entre deux Ă©poux, mariĂ©s sous le rĂ©gime de la sĂ©paration de biens. Un jugement du 1er mars 2012 a prononcĂ© leur divorce et ordonnĂ© la liquidation et le partage de leurs intĂ©rĂȘts patrimoniaux.
Le 29 juin 2018, un notaire a Ă©tabli un projet d’acte de partage faisant apparaĂźtre une somme de 850 968,92 ⏠due par lâex-Ă©poux Ă son ex-conjointe au titre des crĂ©ances entre Ă©poux. Cette derniĂšre a Ă©tĂ© autorisĂ©e, par une ordonnance du 4 juillet 2018, Ă pratiquer une saisie conservatoire pour sĂ»retĂ© d’une crĂ©ance de 900 000 âŹ.
Lâex-Ă©poux a alors saisi le juge de l’exĂ©cution d’une demande tendant Ă la mainlevĂ©e de cette mesure, pratiquĂ©e le 24 juillet 2018 en raison de la prescription de la crĂ©ance allĂ©guĂ©e.
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Pour rejeter cette demande, les juges dâappel ont retenu que, dĂšs l’ordonnance de non-conciliation, le rĂ©gime matrimonial devient une indivision post-matrimoniale et que l’action aux fins de partage est imprescriptible.
En statuant ainsi, estime la Cour de cassation, la Cour dâappel a mĂ©connu les articles 815, 1479, alinĂ©a 1er, 1543 et 2224 du Code civil, desquels il rĂ©sulte que les crĂ©ances qu’un Ă©poux sĂ©parĂ© de biens peut faire valoir contre l’autre et dont le rĂšglement ne constitue pas une opĂ©ration de partage se prescrivent, en matiĂšre personnelle ou mobiliĂšre et en l’absence de disposition particuliĂšre, selon le dĂ©lai de droit commun Ă©dictĂ© par l’article 2224 du Code civil, Ă savoir 5 ans.
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Et de prĂ©ciser Ă©galement, Ă lâoccasion de lâexamen du deuxiĂšme moyen quâil rĂ©sulte de la combinaison des dispositions des articles 2224 et 2236 du Code civil que le dĂ©lai de droit commun susmentionnĂ© commence Ă courir lorsque le divorce a acquis force de chose jugĂ©e.
En l’espĂšce, le fait gĂ©nĂ©rateur de la crĂ©ance allĂ©guĂ©e par lâex-Ă©pouse Ă©tait le transfert de valeurs depuis son patrimoine vers celui de Monsieur et ne pouvait ĂȘtre recherchĂ© dans le projet de partage qui en Ă©tablissait le compte, comme le soutenait Ă tort donc la Cour d’appel.
ConsĂ©cration du pouvoir des notaires de procĂ©der Ă lâadjudication des parts sociales
Dans une dĂ©cision du 19 mai 2022, a Cour de cassation prĂ©cise que les notaires ont, comme tout autre officier public ou ministĂ©riel, le pouvoir de rĂ©aliser lâadjudication des parts sociales.
Il ressort de lâarticle 29 de la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000 (JO 11 juill.) relative aux ventes judiciaires aux enchĂšres publiques, en vigueur jusquâau 1er juillet 2022 conformĂ©ment Ă lâordonnance n° 2016-728 du 2 juin 2016 (JO 3 juin), que les commissaires-priseurs judiciaires ont, avec les autres officiers publics ou ministĂ©riels et les autres personnes lĂ©galement habilitĂ©es, seuls compĂ©tence pour organiser et rĂ©aliser les ventes judiciaires de meubles corporels ou incorporels aux enchĂšres publiques, et faire les inventaires et prisĂ©es correspondants. Selon lâarticle 1er de lâordonnance n° 45-290 du 2 novembre 1945 (JO 25 fĂ©vr.) relative au statut du notariat, les notaires sont des officiers publics. DĂšs lors, ils ont, comme tout autre officier public ou ministĂ©riel, le pouvoir de rĂ©aliser lâadjudication des parts sociales.
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En lâespĂšce, une personne a Ă©tĂ© condamnĂ©e par jugement au paiement dâune somme. Une sociĂ©tĂ© crĂ©anciĂšre a saisi entre ses mains et celles dâune autre sociĂ©tĂ© les parts dĂ©tenues par le dĂ©biteur condamnĂ© dans chacune dâelles. La vente par adjudication de ces parts sociales a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e au profit dâune autre personne physique par la chambre dĂ©partementale des notaires de la Somme. Une cour dâappel a rejetĂ© la demande du dĂ©biteur relative Ă lâannulation des procĂšs-verbaux dâadjudication. Le dĂ©biteur a formĂ© pourvoi contre lâarrĂȘt. Il soutient que la cour dâappel a violĂ© les articles L. 231-1, R. 231-1 et R. 231-5 du Code des procĂ©dures civiles dâexĂ©cution, ainsi que lâarticle L. 211-21 du Code monĂ©taire et financier, dĂšs lors quâelle a considĂ©rĂ© que lâadjudication des droits dâassociĂ©s du dĂ©biteur avait pu ĂȘtre rĂ©alisĂ©e par un notaire.
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En Ă©nonçant le principe susmentionnĂ©, la Cour de cassation rejette le pourvoi. DĂšs lors, elle consacre le principe suivant lequel les notaires ont, comme tout autre officier public ou ministĂ©riel, le pouvoir de rĂ©aliser lâadjudication des parts sociales.
Prestation compensatoire et exclusion du devoir de secours : rappels de la Cour de cassation
Cass. 1re civ., 13 avr. 2022, n° 20-22.807, B
Pour apprĂ©cier l’existence d’une disparitĂ© créée par le divorce dans les conditions de vie respectives des Ă©poux, le juge ne peut pas prendre en considĂ©ration l’avantage constituĂ© par la jouissance gratuite du domicile conjugal accordĂ© Ă l’Ă©pouse au titre du devoir de secours.
Cet arrĂȘt rappelle une jurisprudence dĂ©sormais bien Ă©tablie (v. par exemple, Cass. 1re civ., 18 nov. 2020, n° 19-20.615 ; Cass. 1re civ., 3 mars 2021, n° 20-11.063) selon laquelle les mesures fixĂ©es au titre du devoir de secours prenant fin au moment du prononcĂ© du divorce, elles ne peuvent pas ĂȘtre prises en compte dans l’apprĂ©ciation de la situation du demandeur.
En lâespĂšce, une Ă©pouse se pourvoit en cassation contre lâarrĂȘt qui a rejetĂ© sa demande de prestation compensatoire. Ă lâappui de son pourvoi elle reprochait aux juges du fond dâavoir retenu quâelle a bĂ©nĂ©ficiĂ© de la jouissance gratuite de l’ancien domicile conjugal en exĂ©cution du devoir de secours pour apprĂ©cier son droit Ă une prestation compensatoire.
FidĂšle Ă sa jurisprudence, la Cour de cassation valide ce raisonnement. Elle rappelle quâil rĂ©sulte de lâarticle 270 du Code civil que l’un des Ă©poux peut ĂȘtre tenu de verser Ă l’autre une prestation destinĂ©e Ă compenser, autant qu’il est possible, la disparitĂ© que la rupture du mariage crĂ©e dans leurs conditions de vie respectives. Elle rappelle Ă©galement quâaux termes de lâarticle 271 du mĂȘme code que, la prestation compensatoire est fixĂ©e selon les besoins de l’Ă©poux Ă qui elle est versĂ©e et les ressources de l’autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’Ă©volution de celle-ci dans un avenir prĂ©visible.
Partant la cour dâappel qui pour rejeter la demande de prestation compensatoire formĂ©e par lâĂ©pouse a retenu que celle-ci bĂ©nĂ©ficiait de la jouissance gratuite de l’ancien domicile conjugal depuis prĂšs de sept ans a violĂ© les textes prĂ©citĂ©s : les juges du fond nâavaient pas a prendre en considĂ©ration l’avantage constituĂ© par la jouissance gratuite du domicile conjugal accordĂ©e Ă l’Ă©pouse au titre du devoir de secours pour apprĂ©cier l’existence d’une disparitĂ© créée par le divorce dans les conditions de vie respectives des Ă©poux.
De la loi applicable Ă la rĂ©alitĂ© de lâintention matrimoniale
Cass. 1re civ., 18 mai 2022, n° 21-11.106, B
Quelle que soit la loi personnelle applicable, le mariage requiert le consentement des Ă©poux, au sens de l’article 146 et du premier alinĂ©a de l’article 180 du Code civil. Aussi, lorsqu’au soutien d’une action en nullitĂ© du mariage, un Ă©poux se prĂ©vaut d’un dĂ©faut d’intention matrimoniale de l’autre, cette action est fondĂ©e sur l’article 146, de sorte que la loi française est applicable.
En lâespĂšce un couple de nationalitĂ© tunisienne se marie en Tunisie. Puis, lâĂ©pouse assigne son mari en nullitĂ© du mariage pour erreur sur les qualitĂ©s essentielles tenant Ă l’absence d’intention matrimoniale de celui-ci. DĂ©boutĂ©e par les juges du fond, elle se pourvoit en cassation.
Elle reproche Ă lâarrĂȘt dâappel de ne pas avoir mis en Ćuvre la rĂšgle de conflit de lois et ainsi de ne pas avoir recherchĂ© le droit dĂ©signĂ© par cette rĂšgle. Selon la demanderesse, l’erreur sur la personne ou les qualitĂ©s essentielles du conjoint commise par un Ă©poux s’apprĂ©cie en considĂ©ration de sa loi nationale : les juges du fond auraient donc apprĂ©ciĂ© cette erreur selon le droit tunisien.
Ces arguments ne convainquent pas la Cour de cassation qui rejette son pourvoi.
La Haute juridiction rappelle quâaux termes de l’article 202-1 du Code civil, les qualitĂ©s et conditions requises pour pouvoir contracter mariage sont rĂ©gies, pour chacun des Ă©poux, par sa loi personnelle. Puis, elle prĂ©cise que quelle que soit la loi personnelle applicable, le mariage requiert le consentement des Ă©poux, au sens de l’article 146 et du premier alinĂ©a de l’article 180 du mĂȘme code. Aussi, lorsqu’au soutien d’une action en nullitĂ© du mariage, un Ă©poux se prĂ©vaut d’un dĂ©faut d’intention matrimoniale de l’autre, cette action est fondĂ©e sur l’article 146 du code civil, de sorte que la loi française est applicable.
- DOSSIERS
L’entrepreneur individuel et les effets patrimoniaux de son nouveau statut. Quelles prĂ©cautions lors de l’identification des personnes et la dĂ©signation des biens dans un acte ?
Le nouveau statut de l’entrepreneur individuel issu de la loi en faveur de l’activitĂ© professionnelle indĂ©pendante est entrĂ© en vigueur le 15 mai 2022. Il inaugure de nouvelles logiques et appelle Ă la vigilance lors de la prĂ©paration de la comparution personnelle et la dĂ©signation des biens dans les actes notariĂ©s.
Retour Ă l’unitĂ© du patrimoine sans liquidation. – La loi prĂ©voit qu’en cas de cessation de toute activitĂ© professionnelle indĂ©pendante par l’entrepreneur individuel ou en cas de dĂ©cĂšs, les deux patrimoines sont rĂ©unis (C. com., art. L. 526-22, al. 8), ce qui est logique du fait de l’unitĂ© de la propriĂ©tĂ© de l’entrepreneur. On regrettera l’absence de liquidation obligatoire aprĂšs la radiation de l’entrepreneur individuel du fait de la cessation d’activitĂ© ou de son dĂ©cĂšs ce qui aurait sĂ©curisĂ© immĂ©diatement sa situation ou celle de ses hĂ©ritiers recueillant l’ensemble de l’hĂ©rĂ©ditĂ©, l’unitĂ© de la succession demeurant. NĂ©anmoins, la loi laisse la facultĂ© Ă l’entrepreneur, mĂȘme aprĂšs sa radiation, ou Ă ses hĂ©ritiers, de solliciter l’ouverture d’une procĂ©dure collective de redressement ou de liquidation judiciaire, ce qui sera fort utile pour arrĂȘter les poursuites, traiter le passif excessif et aboutir in fine Ă une liquidation.
Conseil pratique :
Toute succession, mais Ă©galement tout acte entraĂźnant modification de titulaire des droits (divorces et autres sĂ©parations) devra ĂȘtre prĂ©cĂ©dĂ© du questionnaire Ă©voquĂ© ci-dessus pour les actes translatifs entre vifs.
S’il apparaĂźt qu’au titre de l’acte liquidatif sont concernĂ©s des biens inclus dans un patrimoine professionnel, on conseillera une prĂ©-liquidation de ce patrimoine professionnel afin que les successeurs ou nouveaux titulaires puissent requĂ©rir l’ouverture Ă©ventuelle d’une procĂ©dure collective. Ă dĂ©faut de volontĂ© exprimĂ©e en ce sens, on expliquera les Ă©ventuelles consĂ©quences au titre de la rĂ©union des patrimoines et de l’obligation gĂ©nĂ©rale au passif qui en rĂ©sulte.
Le « débiteur entrepreneur individuel » et les gages spéciaux des créanciers chirographaires, les nouveaux réflexes pratiques
La loi en faveur de l’activitĂ© professionnelle indĂ©pendante consacre une nouvelle catĂ©gorie de dĂ©biteur, le « dĂ©biteur entrepreneur individuel », dotĂ© d’un statut dĂ©rogatoire Ă l’Ă©gard des crĂ©anciers, ce qui suscite de nouveaux rĂ©flexes pratiques liĂ©s Ă l’identification des gages et Ă l’exĂ©cution sur les biens.
âą L’EI est un dĂ©biteur Ă statut lĂ©gal particulier qui ne rĂ©pond plus par principe de toutes ses dettes sur tous ses biens.
âą L’assiette des gages offerts aux crĂ©anciers chirographaires est en principe fonction de la nature de leur crĂ©ance, sauf renonciation au statut ou aux rĂšgles propres aux crĂ©anciers fiscaux et sociaux.
âą La rĂ©daction d’un acte notariĂ© dans lequel au moins une des parties est un entrepreneur individuel obligera le rĂ©dacteur Ă identifier la qualitĂ© sous laquelle l’entrepreneur agit et, partant, celui des gages concernĂ©s par l’acte afin de bien aviser ledit entrepreneur.
âą L’exĂ©cution forcĂ©e sur les biens de l’EI supposera de vĂ©rifier la nature de la crĂ©ance dans le titre exĂ©cutoire pour identifier quels sont les biens saisissables.
Entrepreneur individuel : et si les difficultés concernaient le financement du patrimoine privé ?
La nouvelle sĂ©paration des patrimoines de l’entrepreneur individuel suscite des interrogations (et pour certains, des doutes) sur la question centrale du financement. Il convient donc de recenser ses incidences sur les garanties octroyĂ©es par l’entrepreneur. Or, les dispositions nouvelles ont optĂ© pour un systĂšme rĂ©aliste en permettant la garantie du patrimoine professionnel par le patrimoine privĂ©. En revanche, le lĂ©gislateur ne s’est pas prĂ©occupĂ© des garanties apportĂ©es par le patrimoine professionnel pour le financement du patrimoine privĂ© ou des proches de l’entrepreneur. Cette abstention suscite des difficultĂ©s d’interprĂ©tation et pourrait pĂ©naliser l’entrepreneur individuel dans le dĂ©veloppement du pan privĂ© de son patrimoine ou dans le soutien familial qu’il souhaite apporter.
âą Si elle n’est pas encouragĂ©e, la garantie de l’activitĂ© professionnelle par le patrimoine privĂ© de l’entrepreneur reste possible. Elle peut emprunter deux voies : les sĂ»retĂ©s rĂ©elles de droit commun et une renonciation formaliste et spĂ©ciale.
⹠La garantie du pan privé par le patrimoine professionnel doit susciter plus de prudence : elle devrait pouvoir reposer sur les sûretés réelles classiques, en revanche la voie de la renonciation semble fermée.
⹠Dans les deux cas, les « sûretés personnelles pour soi » sont exclues.