Droit immobilier : 

• Vente par adjudication d’un lot de copropriété : le coût de l’état daté n’incombe pas au copropriétaire concerné

• Inscription au livre foncier d’une copropriété assise sur deux parcelles distinctes

• Location touristique des locaux commerciaux : vers une publication du décret d’ici l’été

• Mise en conformité du règlement de copropriété : abrogeons l’article 6-4 de la loi du 10 juillet 1965 !

Droit de l’urbanisme :

• Prise en charge d’une indemnisation liée à une erreur dans un PLU

Droit fiscal :

• Mise en ligne des avis d’acompte de CFE-IFER 2021 : modulation possible pour les entreprises disposant de locaux industriels

Droit de la famille :

• Dépense d’acquisition d’un bien indivis : l’article 815-13 désormais exclu…

• Nouveau régime des décisions médicales à l’égard des majeurs protégés : dispositions réglementaires

• Liquidation des intérêts pécuniaires des époux lors du divorce et créance de l’époux contre son conjoint

• Prestation compensatoire : rappel sur l’origine de la disparité

• Pas de signes diacritiques à l’état civil

 

Droit immobilier : 

Vente par adjudication d’un lot de copropriété : le coût de l’état daté n’incombe pas au copropriétaire concerné

Cass, 3°ch.civ, 20 mai

Il est rappelé que lors d’une vente par adjudication d’un lot de copropriété, le paiement de la provision du budget prévisionnel exigible avant la mutation de propriété incombe au copropriétaire saisi ; mais le paiement du coût de l’état daté n’incombe pas à ce copropriétaire.

Faits : Un jugement du 5 octobre 2011 adjuge des lots de copropriété appartenant à une copropriétaire. Le syndicat des copropriétaires forme opposition au versement des fonds et assigne la copropriétaire en paiement d’un arriéré de charges. L’arrêt attaqué la condamne à payer au syndicat cet arriéré de charges de copropriété impayées arrêté au quatrième trimestre 2011. La copropriétaire se pourvoit en cassation. Plusieurs moyens sont soulevés ; le premier par la copropriétaire, le second d’office.

La copropriétaire estime que la cour d’appel aurait violé, par fausse application, les articles 6-2 du décret du 17 mars 1967 et 14-1 de la loi du 10 juillet 1965. Elle aurait par ailleurs privé sa décision de base légale au regard des mêmes articles.

La Cour de cassation rejette le pourvoi sur ce point. En effet, l’article 14-1 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que, sous réserve de la fixation des modalités différentes par l’assemblée générale, les copropriétaires versent au syndicat des provisions, égales au quart du budget prévisionnel voté, exigibles le premier jour de chaque trimestre.

Par ailleurs, selon l’article 6-2, 1° du décret du 17 mars 1967, à l’occasion de la mutation à titre onéreux d’un lot, le paiement de la provision, exigible en application de l’article précédent, incombe au vendeur.

Ainsi, la Cour de cassation conclut que, à l’occasion d’une vente par adjudication d’un lot de copropriété, le paiement de cette provision incombe au copropriétaire saisi. Or, la cour d’appel avait relevé que la provision était devenue exigible le 1er octobre 2011, donc avant la mutation du 5 octobre. Elle a donc exactement pu en déduire que la copropriétaire devait être condamnée à son paiement.

Second moyen relevé d’office : l’arrêt de la cour d’appel est cassé par un moyen relevé d’office, au visa des articles 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa rédaction issue de la loi du 12 juillet 2010, et L. 322-9 du Code des procédures civiles d’exécution. Le premier de ces textes prévoit que sont imputables au seul copropriétaire concerné les honoraires du syndic afférents aux prestations qu’il doit effectuer pour l’établissement de l’état daté à l’occasion de la mutation à titre onéreux d’un lot ou d’une fraction de lot. Mais le second dispose que l’adjudicataire paye les frais de la vente.

Ainsi, pour la Cour de cassation, « il en résulte que l’imputation du coût de l’état daté au copropriétaire concerné n’est pas applicable en cas de vente par adjudication d’un lot de copropriété ». Elle estime que la cour d’appel, en retenant, pour condamner la copropriétaire au paiement du coût de l’état daté, qu’il doit être établi par le syndic en cas de mutation d’un lot à titre onéreux, quelle que soit la nature de cette mutation, a violé l’article 10-1 par fausse application.

 

Inscription au livre foncier d’une copropriété assise sur deux parcelles distinctes

Cass. 3e civ., 27 mai 2021

Faits : Un notaire sollicite l’inscription au livre foncier d’une copropriété assise sur deux parcelles distinctes.

La demande est rejetée par le juge du livre foncier. Le notaire forme un pourvoi à l’encontre de l’ordonnance. Sans succès. La cour d’appel de Colmar retient que le fait de constituer une assiette de copropriété sur deux parcelles distinctes est assimilé à une réunion de fait qui doit respecter l’article 34 du décret du 7 octobre 2009 relatif au livre foncier et à son informatisation dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

La Cour de Cassation infirme le jugement d’appel. Elle expose alors que l’inscription au livre foncier d’un immeuble soumis au régime de la copropriété assis sur deux parcelles distinctes appartenant à un même titulaire de droit n’implique pas la réunion préalable de ces parcelles.

 

Location touristique des locaux commerciaux : vers une publication du décret d’ici l’été

Rép. min. 25 mai 2021

L’article 55 de la loi Engagement et proximité du 27 décembre 2019 a modifié l’article L. 324-1-1 du Code de tourisme afin de permettre au maire, dans les communes concernées, de soumettre à autorisation préalable la location d’un local à usage commercial en tant que meublé de tourisme. L’entrée en vigueur de cette disposition est subordonnée à la publication d’un décret, qui plus d’un an après la promulgation de la loi, n’est toujours pas été publié.

Interrogée par un parlementaire sur le calendrier prévisionnel de la publication de ce texte, la ministre en charge du Logement précise que le projet de décret d’application est élaboré, et soumis pour avis au Conseil national de l’évaluation des normes, ainsi qu’au Conseil d’État, qui devraient se prononcer prochainement, afin de permettre une entrée en vigueur à l’été 2021. Les communes qui le souhaitent pourront alors se saisir de ce nouvel outil de régulation, complétant le dispositif existant à leur disposition.

 

Mise en conformité du règlement de copropriété : abrogeons l’article 6-4 de la loi du 10 juillet 1965 !

Etude rédigée par  Julien  Laurent et Matthieu  Poumarède

Le nouvel article 6-4 de la loi du 10 juillet 1965 dans sa rédaction issue de la loi Élan subordonne « l’existence » des parties communes spéciales et de celles à jouissance privative à « leur mention expresse dans le règlement de copropriété ». 

À l’approche de la date limite du 23 novembre 2021 pour mettre en conformité les règlements de copropriété, les défauts du texte deviennent de plus en plus apparents, et nul n’est en mesure de dire avec certitude les conséquences et sanctions qui y seront attachées. 

La lettre seule de l’article 6-4 ne laisse guère de place au doute. Si l’« existence » des parties communes spéciales ou privatives est effectivement « subordonnée » à leur mention expresse dans le règlement de copropriété, il paraît difficile de ne pas en déduire que la sanction de l’absence de mention dans ledit règlement réside précisément dans l’inexistence des parties communes spéciales et des parties communes à jouissance privative. Autrement dit, depuis l’entrée en vigueur de la loi Élan énonçant l’article 6-4 de la loi du 10 juillet 1965, les parties communes spéciales comme les parties communes à jouissance privative n’accèdent plus à l’existence tant qu’elles ne font pas l’objet d’une mention expresse dans le règlement de copropriété.

Il a pu être néanmoins plaidé qu’il faudrait réserver un sort différent aux droits nés antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi Élan et qui n’auraient fait l’objet d’une mise en conformité dans les termes de l’article 209, II Autrement dit, l’absence de mention de ces droits dans le règlement de copropriété, au lendemain de la période de mise en conformité s’achevant le 23 novembre 2021, n’aurait aucun effet, l’existence de ces droits-là n’étant pas remise en cause. 

Selon cette interprétation, il résulterait une distinction à opérer selon la date de « constitution » des parties communes spéciales et à jouissance privative. Pourtant, à défaut, dans le texte de l’article 6-4, de précision contraire conduisant à distinguer les situations selon leur date de constitution, et alors même que le législateur a justement donné un délai de 3 ans aux syndicats de copropriétaires pour mettre en conformité les règlements, cette interprétation ne saurait l’emporter. 

Ainsi l’auteur soulève l’idée selon laquelle subordonner l’existence de quoi que ce soit à l’accomplissement d’une formalité, revient à dénier toute existence en son absence. Une telle sanction pourrait relever d’une certaine logique propre au droit de la copropriété. En effet, d’une certaine manière, tant les parties communes à jouissance privative que les parties communes spéciales, constituent, d’après l’auteur, une anomalie en copropriété. Échappant à la classification binaire du droit de la copropriété mais répondant à des nécessités pratiques, elles ont fini par être consacrées par la jurisprudence, puis par le législateur. Mais leur existence doit désormais être mentionnée dans le règlement de copropriété. 

Cette mention expresse ferait alors sens. Leur existence, ainsi que celle des parties communes spéciales appelle donc désormais l’« accord » des copropriétaires formalisé par la mention expresse de ces parties communes dans le règlement de copropriété dont chaque copropriétaire a le « droit d’exiger le respect par les autres ». À défaut, demeurant hors du « contrat de copropriété », les droits de jouissance privative dégénéreraient en tolérances, tandis que les parties communes spéciales disparaîtraient au risque d’emporter avec elles la répartition spéciale des charges, ce que laisse entendre l’article 6-2, alinéa 2, dont la rédaction exclut la réciprocité.

La brutalité de l’inexistence des droits, qui pourrait résulter automatiquement de l’absence de mention expresse au règlement de copropriété, conduit à mobiliser l’esprit du texte plutôt que sa lettre. Il semble en effet que le législateur ait eu, principalement, en vue l’information des copropriétaires. L’objectif ne serait donc pas tant de priver des copropriétaires de droits que de les informer de l’existence de ces droits par leur mention expresse dans le règlement. C’est ainsi qu’il peut être proposé deux voies d’interprétation de l’article 6-4.

En premier lieu, la voie du réputé non écrit. Elle permettrait de sanctionner « en douceur » les parties communes qui ne seraient pas expressément mentionnées dans le règlement de copropriété contrairement aux exigences de l’article 6-4. En effet, tant qu’elle n’est pas prononcée par le juge, la clause réputée non écrite demeure applicable ; les copropriétaires auraient donc la possibilité de « régulariser la situation » a posteriori. 

Mais encore faut-il admettre qu’une clause de l’état descriptif de division, voire une décision d’assemblée générale mentionnant, par exemple, une partie commune spéciale ou un droit de jouissance privatif, puisse être qualifiée de « clause réputée non écrite » au sens de l’article 43 de la loi du 10 juillet 1965, ce qui demeure sujet à interrogations. Du point de vue substantiel, celle de savoir si une clause ne répondant pas aux exigences de l’article 6-4 peut-être réputée non écrite alors qu’elle ne met aucunement en péril le règlement de copropriété. 

Ensuite, concernant la seconde interprétation de l’article 6-4, l’auteur se demande s’il ne faudrait pas considérer, que cet article de la loi constitue une obligation pour le syndicat de mentionner expressément les parties communes spéciales et les parties communes à jouissance privative dans le règlement de copropriété. L’article 6-4 aurait ainsi pour destinataire le syndicat des copropriétaires appelé à mentionner expressément dans le règlement de copropriété les droits par ailleurs constitués dès lors qu’ils réunissent les conditions de fond énoncées aux articles 6-2 et 6-3 de la loi du 10 juillet 1965. Autrement dit, la mention expresse dans le règlement de copropriété consacrerait l’existence du droit mais ne le constituerait pas. L’assemblée générale ne pourrait alors voter contre une résolution proposant la mention expresse de la partie commune spéciale ou de celle à jouissance privative dans le règlement de copropriété, sans engager sa responsabilité, dès lors qu’elles répondent aux définitions des articles 6-2 ou 6-3 de la loi du 10 juillet 1965. À défaut, il serait loisible au copropriétaire ou tiers intéressé de solliciter le juge pour l’y contraindre, tout en recherchant la responsabilité du syndicat des copropriétaires.

Une autre conséquence du texte, passée plus inaperçue, doit notamment être signalée : en subordonnant l’existence des parties à jouissance privative à leur mention expresse dans le règlement de copropriété, l’article 6-4 ne fait-il pas désormais obstacle et pour le futur à l’acquisition par usucapion trentenaire ou abrégée d’un droit de jouissance privative ? Comment en effet acquérir ce droit par prescription puisque, dans cette hypothèse, leur « existence » ne peut à l’évidence être mentionnée qu’a posteriori dans le règlement de copropriété ? 

Si l’on adopte une approche littérale du texte faisant de l’acquisition du droit de jouissance privative une sorte d’acte solennel, la réponse est sans doute positive. S’il est difficile de penser que l’intention du législateur soit allée jusqu’à souhaiter déjouer le jeu normal et universel de la prescription acquisitive en la matière, c’est pourtant bien ce risque que porte en germe l’article 6-4 en obligeant à porter mention des droits dans le règlement. 

Ainsi, en conclusion, le législateur ne poursuivait sans doute qu’une volonté de mise en ordre des droits en copropriété, un objectif de clarification et de simplification. Cependant, un excès d’élan formaliste, une rédaction imprécise et un choix de termes malheureux au contenu juridique incertain, auront abouti à un texte inopportun d’un point de vue pratique, potentiellement inconstitutionnel et/ou inconventionnel, contraire à la jurisprudence constante de la Cour de cassation et dont les effets perceptibles et prévisibles sont contraires aux mécanismes les plus fondamentaux de notre système de droit des biens. 

Droit de l’urbanisme :

Prise en charge d’une indemnisation liée à une erreur dans un PLU

Réponse ministérielle du 20 mai 

Une sénatrice demande à la ministre de la Cohésion des territoires quels sont les recours envisageables par la commune pour obtenir une prise en charge des indemnités versées à un administré suite au classement par erreur d’une parcelle en parcelle « constructible » dans le PLU élaboré par un EPCI.

Le ministère rappelle que la circonstance particulière que l’illégalité de l’autorisation d’urbanisme trouve son origine dans le classement erroné d’une parcelle retenu dans un plan local d’urbanisme (PLU) élaboré et approuvé par un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ne fait pas obstacle à ce que soit engagée, au profit du bénéficiaire de l’autorisation, la responsabilité de la commune qui a exercé sa compétence en délivrant irrégulièrement ou en refusant irrégulièrement de délivrer ladite autorisation.

Dès lors, la faute commise par le maire de la commune dans la mise en œuvre de son pouvoir de délivrance des autorisations d’urbanisme est donc distincte de celle résultant de l’illégalité du PLU imputable à l’EPCI. Cette circonstance permet au bénéficiaire de l’autorisation de construire illégale de rechercher la responsabilité de la commune « pour le tout » dès lors que la faute du maire de la commune porte en elle l’intégralité du dommage au moment où elle a été commise.

Toutefois, cette situation, favorable à l’administré, n’implique pas que la charge de la dette pèse sur la seule commune. Dans la mesure où l’illégalité de l’autorisation d’urbanisme trouve son origine dans l’illégalité du classement retenu par le PLU élaboré par l’EPCI, la commune qui s’est vue condamnée à indemniser la victime est en droit de former une action récursoire contre l’EPCI afin d’obtenir réparation du préjudice que lui a causé le fait de devoir indemniser le bénéficiaire du permis de construire illégal.

In fine, le juge peut déterminer les responsabilités respectives des deux personnes publiques.

 

Droit fiscal :

Mise en ligne des avis d’acompte de CFE-IFER 2021 : modulation possible pour les entreprises disposant de locaux industriels

Minefi, communiqué, 27 mai 2021

Les avis d’acompte de cotisation foncière des entreprises ( CFE ) et/ou d’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) ne sont plus envoyés par voie postale mais sont uniquement consultables en ligne dans l’espace professionnel sur le site impots.gouv.fr préalablement à la date limite de paiement de l’acompte du 15 juin.

Les entreprises redevables dont la cotisation annuelle de CFE 2020 est supérieure ou égale à 3 000 € et qui n’ont pas choisi le paiement mensualisé doivent payer au plus tard le 15 juin 2021 un acompte égal à 50 % de la cotisation de CFE mise en recouvrement en 2020.

L’Administration indique que les avis d’acompte de CFE-IFER 2021 peuvent être consultés en ligne. Pour pouvoir accéder à leur avis en ligne, les entreprises qui ne l’ont pas déjà fait sont invitées par la DGFiP à créer dès maintenant leur espace professionnel sur le site impots.gouv.fr.

Est également rappelé  que toutes les entreprises doivent payer leur cotisation de CFE et/ou d’IFER par un moyen de paiement dématérialisé. Plusieurs options sont possibles :

  • l’adhésion au prélèvement à l’échéance jusqu’au 31 mai 2021 minuit sur le site impots.gouv.fr ou auprès des Centres Prélèvement Service (CPS) dont les coordonnées figurent sur l’avis ;
  • l’adhésion au prélèvement mensuel jusqu’au 15 juin 2021 minuit, également sur le site impots.gouv.fr ou auprès des CPS ;
  • le paiement ponctuel direct en ligne jusqu’au 15 juin 2021 minuit en cliquant simplement sur le bouton « Payer » situé au-dessus de l’avis (sous réserve de l’enregistrement préalable du compte bancaire dans l’espace professionnel).

Dans le cadre de la réforme des impôts de production, les locaux industriels bénéficient désormais d’une diminution de 50 % de leur base imposable.

La loi de finances pour 2021 a en effet modernisé, pour les impositions établies à compter de 2021, les paramètres de la méthode d’évaluation de la valeur locative des établissements industriels en réduisant de moitié le taux d’intérêt applicable au prix de revient des différents éléments, d’une part, et en prévoyant la prise en compte des nouveaux taux d’intérêt pour l’application des dispositifs de plancher et de lissage d’autre part.

L’administration fiscale indique que les entreprises concernées peuvent moduler en conséquence le montant de l’acompte, avec une marge d’erreur de 20 % exceptionnellement tolérée. Cette modulation doit être réalisée avant le 31 mai 2021 pour les entreprises ayant opté pour le prélèvement à l’échéance.

Droit de la famille : 

Dépense d’acquisition d’un bien indivis : l’article 815-13 désormais exclu… 

Commentaire par Coline CADOUOT-ULLIEL et Sébastien RICHARD sur un arrêt de la CC rendu le 26 mai 2021

Par un arrêt du 26 mai 2021, la Cour de cassation semble opérer un revirement de jurisprudence, en revenant sur les dépenses constituant une créance de l’article 815- 13 du Code civil. 

Le premier alinéa de ce texte dispose que « lorsqu’un indivisaire a amélioré à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l’équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l’aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu’il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu’elles ne les aient point améliorés ». 

Ainsi, l’indivisaire qui expose une dépense ayant permis d’améliorer ou de conserver le bien indivis se voit reconnaître une créance à l’encontre de l’indivision sur le fondement de ce texte. 

Bien que cet article ne vise que les dépenses effectuées au cours de l’indivision, la jurisprudence en a étendu l’application aux dépenses ayant permis l’acquisition du bien indivis. 

S’agissant du remboursement de l’emprunt souscrit pour financer l’acquisition du bien indivis, la cour de cassation avait retenu cette solution dès 1983, qualifiant ce remboursement de dépense de conservation en ce qu’elle empêche la saisie du bien acquis. 

S’agissant de l’apport effectué en vue de l’acquisition du bien indivis, la Cour a d’abord rejeté l’existence d’une créance au titre de l’article 815-13 du Code civil avant de l’admettre par un arrêt du 6 décembre 2005. Sa position était restée depuis inchangée. C’est cette solution qui est remise en cause par l’arrêt rendu le 26 mai 2021. 

Le faits de l’arrêt étaient les suivants, Mme D est décédée le 21 mars 2007, laissant pour lui succéder son époux, avec lequel elle était mariée sous le régime de la séparation de biens, et trois enfants issus d’une précédente union, les consorts Z. Des difficultés sont survenues au cours du partage de la succession. Par un arrêt du 14 mai 2019, la cour d’appel de Rennes a notamment dit que la succession de Mme D est titulaire d’une créance à l’encontre de son époux de 11 625 euros au titre du financement par des fonds personnels à Mme D de la quote-part indivise de M. Y, son époux, sur un bien situé à Rennes. 

M. Y fait notamment grief à l’arrêt de déclarer recevables les demandes des consorts Z tendant à l’inscription des créances et de dire que la succession est titulaire d’une créance à son encontre à hauteur de 11 625 euros au titre du bien situé à Rennes, « alors que lorsqu’un époux séparé de biens a, par ses deniers personnels, permis le financement de l’acquisition d’un immeuble indivis entre les époux, il ne peut prétendre qu’à une indemnité à l’encontre de l’indivision et non contre son époux ; qu’en jugeant que la succession était titulaire, en raison du financement du bien indivis par Mme D avant son décès, d’une créance à l’encontre de M. Y à hauteur de 11 625 euros, la cour d’appel a violé l’article 815-13 du code civil ». 

L’arrêt d’appel est censuré par la Cour de Cassation qui retient que : 

« 10. D’une part, selon l’article 815-13 du code civil, un indivisaire peut prétendre à une indemnité à l’encontre de l’indivision évaluée selon les modalités qu’il prévoit lorsqu’il a, à ses frais, amélioré l’état d’un bien indivis ou fait de ses deniers personnels des dépenses nécessaires à la conservation de ce bien. 

11. Ce texte ne s’applique pas aux dépenses d’acquisition. 

12. Il en résulte qu’un époux séparé de biens qui finance, par un apport de ses deniers personnels, la part de son conjoint dans l’acquisition d’un bien indivis peut invoquer à son encontre une créance évaluable selon les règles auxquelles renvoie l’article 1543 du code civil ». 

Dorénavant, lors de la liquidation du régime matrimonial d’époux séparés de biens, celui qui aura financé un bien indivis au-delà de sa quote-part d’acquisition au moyen d’un apport plus important semble devoir invoquer une créance entre époux, et non plus une créance contre l’indivision, en application des dispositions de l’article 1543 du Code civil.

Mais les auteurs relèvent que cette décision laisse plusieurs questions en suspens. Ne circonscrivant pas la notion de « dépenses d’acquisition », on peut se demander si le remboursement de l’emprunt souscrit en vue de financer l’acquisition est également concerné.

Par ailleurs, on peut s’interroger sur le point de savoir si cette solution doit être étendue aux couples de partenaires ou de concubins.

 

Nouveau régime des décisions médicales à l’égard des majeurs protégés : dispositions réglementaires

Le décret du 28 mai 2021 tire les conséquences de l’ordonnance de mars 2020 relative au régime des décisions prises en matière de santé, de prise en charge ou d’accompagnement social ou médico-social à l’égard des personnes majeures faisant l’objet d’une mesure de protection juridique. Il procède aux adaptations rendues nécessaires du Code de la santé publique et du Code de l’action sociale et des familles.

 

Liquidation des intérêts pécuniaires des époux lors du divorce et créance de l’époux contre son conjoint

Cass, 1er ch.civ, 26 mai

Cet arrêt expose que lorsque la liquidation des intérêts pécuniaires des époux a été ordonnée par une décision de divorce passée en force de chose jugée, elle englobe tous les rapports pécuniaires entre les parties, y compris les créances nées avant le mariage. Il appartient dès lors à l’époux qui se prétend créancier de l’autre de faire valoir sa créance contre son conjoint lors de l’établissement des comptes s’y rapportant.

Faits : Deux concubins se marient sans contrat préalable. Un jugement prononce leur divorce et ordonne le partage de leurs intérêts patrimoniaux. Le notaire désigné dresse un procès-verbal de difficultés et le juge commis constate la non-conciliation des parties et les renvoie devant le tribunal qui, par un jugement statue sur les désaccords persistants. Les parties signent l’acte de partage établi par le notaire et l’ex-époux assigne son ex-épouse aux fins d’obtenir une indemnité sur le fondement de l’enrichissement sans cause, pour avoir financé, avant le mariage, la maison dont celle-ci est seule propriétaire.

L’arrêt d’appel déclare les demandes irrecevables et la Cour de cassation approuve la cour d’appel. Après avoir relevé que le jugement de divorce avait fait application de l’article 264-1 du Code civil, alors en vigueur, selon lequel, en prononçant le divorce, le juge aux affaires familiales ordonne la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux et énoncé que la liquidation englobe tous les rapports pécuniaires existant entre les époux et qu’il appartient celui qui se prétend créancier de son conjoint de faire valoir sa créance lors de l’établissement des opérations de comptes et liquidation, la cour d’appel en a exactement déduit, que l’ex-époux n’est plus recevable à agir postérieurement au jugement qui a statué sur les désaccords persistants et l’acte de partage.

 

Prestation compensatoire : rappel sur l’origine de la disparité

Cass. 1re civ., 26 mai 2021

La Cour de cassation rappelle que pour apprécier la disparité ouvrant droit à prestation compensatoire, les juges du fond n’ont pas à prendre en considération les circonstances antérieures au mariage.

En l’espèce, la Cour censure l’arrêt d’appel qui, pour rejeter la demande de prestation compensatoire, a retenu qu’il n’était pas justifié que la situation de l’épouse était plus favorable au moment de son union.

La Cour de cassation, au visa des articles les articles 270 et 271 du Code civil, confirme le principe. Elle précise qu’« il résulte du premier de ces textes que l’un des époux peut être tenu de verser à l’autre une prestation destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. Selon le second, la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ».

En statuant ainsi, en se fondant sur des circonstances antérieures au mariage, la cour d’appel a violé les textes précités.

 

Pas de signes diacritiques à l’état civil

Cons. const., 21 mai 2021

Le Conseil constitutionnel a censuré l’article 9 de la loi n° 2021-641 du 21 mai 2021, relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion, qui autorisait les signes diacritiques des langues régionales dans les actes de l’état civil.

Le Conseil constitutionnel considére qu’« en prévoyant que des mentions des actes de l’état civil peuvent être rédigées avec des signes diacritiques autres que ceux employés pour l’écriture de la langue française, ces dispositions reconnaissent aux particuliers un droit à l’usage d’une langue autre que le français dans leurs relations avec les administrations et les services publics. Dès lors, elles méconnaissent les exigences de l’article 2 de la Constitution [La langue de la République est le français] ».

Seuls demeurent donc autorisés dans les actes d’état civil les signes énumérés limitativement par la circulaire ministérielle du 23 juillet 2014 relative à l’état civil

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